
Ni Tanjung
1930-2020, Indonesie
A près de 80 ans, Ni Tanjung dessine, dans la solitude de sa petite chambre sans fenêtre, des milliers de visages multicolores. Des visages de femme, principalement – autoportraits ou ancêtres, personnages imaginaires d’un théâtre personnel.
C’est à la mort de son mari qu’elle commence à dessiner. Le choc est tel qu’elle tombe malade; on la transporte, faible et décharnée, chez sa fille dans un village voisin. C’est dans cette existence recluse que la vieille femme au corps grêle et fragile dessine, fait des découpages et surtout des assemblages complexes, extrêmement créatifs, de figures en papier.
Exécutés à la craie grasse sur de simples papiers, ces montages, composés de plusieurs découpages coloriés, reconstituent l’histoire de sa vie et font revivre ses ancêtres et ses proches.
Si la créatrice ne peut plus danser comme elle le faisait autrefois, elle se met parfois à chanter et à animer des scènes entre plusieurs personnages. Une dizaine de dessins, découpages et grands assemblages sont disposés méticuleusement contre le mur et sur le lit. Une fois toutes ses créations mises en exposition, Ni Tanjung sort un petit miroir dans lequel elle observe de manière indirecte ses œuvres. Ce processus lui permet en quelque sorte de fixer leur image dans sa mémoire ; elle ne peut d’ailleurs céder une de ses créations sans avoir procédé à cet acte symbolique.